This post is also available in: English (Anglais)

Jeudi 12 – Dimanche 29 Mars

WATER EYES
JULIE STEPHEN CHHENG

France

Chapelle de l’Ancien Hôpital Général

Horaires d’ouverture :
Du mardi au samedi de 14h à 19h

Pour des visites de groupes ou de scolaires, merci de contacter l’équipe de VIDEOFORMES par mail (videoformes@videoformes.com) ou par téléphone (+ 33(0)4 73 17 02 17) au moins 48h à l’avance. Merci de votre compréhension.

L’oeuvre :

Water Eyes a commencé à Montrond-les-Bains, au sein de la médiathèque des Passerelles, avec un temps de résidence permettant d’appréhender l’atmosphère du lieu, d’échanger avec les habitants et de laisser le territoire influencer la création. La découverte des villes d’eau a enrichi la compréhension symbolique de l’eau, notamment l’idée de « routes » qui relient êtres vivants et territoires. 

Il en est ressorti Water Eyes, une fresque modulaire en réalité augmentée de Julie Stephen Chheng construite autour d’un personnage : celui de l’eau. Grâce à une application gratuite intitulée Fortune Teller AR, les visiteurs animent les yeux et accèdent à sa vision du monde, profonde, résiliente et poétique à travers un filtre aquatique. 

La narration s’inspire de différentes philosophies de l’eau ( Wu WeiMizu no KokoroPanta Rhei … ) et de nombreuses expressions du monde entier qui témoignent d’une sagesse universelle. Au fil de l’expérience, la voix de l’eau partage conseils et réflexions.

Cette structure permet deux niveaux d’usage : une fresque pour le public ainsi que des ateliers permettant de créer son propre gardien et ainsi, de continuer à reçevoir des conseils au quotidien.

Le projet conjugue narration, animation, musique et image afin de proposer un univers immersif et énigmatique. Accompagnée de Thomas Pons et de Julien Hognon, l’expérience proposent des filtres AR afin d’offrir une vision incarnée du personnage de l’eau. Visuellement, les dessins au feutre évoquent des routes d’eau visibles et invisibles, métaphore des liens unissant lieux et personnes.

L’ensemble aborde la multiplicité des regards : la possibilité d’élargir sa perception en adoptant celle d’un autre être, d’une autre culture ou d’une autre sensibilité à travers la compréhension des différences.

Crédits :

Textes et images: Julie Stephen Chheng

Animation; Thomas Pons

Sound Design: Apollo Noir 

Développeur: Julien Hognon

L’artiste :

Julie Stephen Chheng, diplômée des Arts Décoratifs de Paris, explore le papier et le numérique dans le livre, le design et la scénographie. Autrice de nombreux livres, applications et expositions interactives, elle a été en résidence à Kyoto à la Villa Kujoyama, à Hong Kong avec le HKAC et à Auckland à la Villa Antipode. Créatrice d’Uramado AR et collaboratrice d’Hermès, elle développe aujourd’hui Fortune Teller et Paysages en construction.

Site Web de l’artiste : https://juliestephenchheng.com/

POUR EN SAVOIR PLUS...

Propos recueillis par Fanny Bauguil (professeure relai à VIDEOFORMES)

  • Comment décririez-vous cette installation ? Que voit-t-on ? Qu’entend-t-on ? Qu’y fait-t-on ?

Fortune Teller est une fresque en réalité augmentée pour aller à la rencontre du personnage de l’eau. Le spectateur télécharge une application gratuite intitulée Fortune Teller AR et anime les yeux de l’illustration. Un filtre et des animations invitent à voir à travers le regard de l’eau. Des textes permettent d’appréhender sa vision du monde et de saisir la philosophie de l’eau à travers certains concepts autour de la symbolique de l’eau.

 

  • De quoi ça parle ?

Ça parle de l’eau en tant que personnage. Globalement, les textes s’inspirent de différents écrits venant du monde entier dont par exemple: l’Eau et les Rêves de Gaston Bachelard.

 

  • Est-ce la première fois que cette installation est présentée au public ? Pouvez-vous nous parler un peu du processus d’élaboration de l’œuvre pour en arriver à ce résultat ?

Oui, c’est la première fois. Pour ce projet avec la Route des Villes d’Eaux, je suis intervenue à Montrond-les-Bains, principalement au sein de la médiathèque Les Passerelles, mais aussi dans d’autres lieux de la ville. C’est un territoire agréable, propice aux balades, doté d’un très beau patrimoine, notamment un magnifique château à ciel ouvert qui marque le paysage.

J’ai pu m’y installer une semaine avec mon compagnon et animateur Thomas Pons afin de poser les premiers dessins et les premières animations. Vivre sur place permet de ressentir la « vibe » du lieu. C’est aussi une histoire de rencontres: échanger avec les habitants, se laisser influencer, laisser le territoire et ses gens imprégner le projet.

Je ne connaissais pas les villes d’eaux avant ce projet. J’avais toutefois quelques notions de thérapies par l’eau, notamment en Inde et en Chine. Je trouve l’idée de la Route des Villes d’Eaux très poétique, autant par ce qu’elle symbolise: l’eau comme élément thérapeutique, capable de soigner, que par sa dimension de lien : l’eau relie les personnes entre elles, mais aussi, à une autre échelle, les villes, les territoires et même l’Europe.

Dans mon travail, j’ai toujours été sensible à l’eau : j’ai souvent représenté des univers marins, des rivières, des lacs, des marées… des images très chargées symboliquement. Je reviens d’ailleurs de Nouvelle-Zélande, où l’eau occupe une place très particulière et où les gens se situent beaucoup par rapport à elle.
Habiter Paris me permettrait presque de me présenter en disant que j’habite « au sud de la rivière » et que je suis née « près de la mer ».

Petit à petit, après plusieurs mois.

Water Eyes est devenue une fresque composée de modules, qui s’augmente grâce à une application. Elle raconte l’histoire du personnage de l’Eau. Avec cette application, on peut littéralement voir à travers son regard : accéder à sa perception du monde. Dans cette proposition, seuls les yeux s’animent, une idée que j’aimais beaucoup, car elle offre une porte d’entrée narrative très forte.

Enfin, avoir tout construit autour des yeux permet plusieurs niveaux d’usage :

  • une fresque combinatoire, qui peut être différente à chaque fois
  • un jeu avec le lieu, ici Les Passerelles, pour intégrer des yeux sur le mobilier et ainsi, incarner le personnage de l’eau sur des éléments du réel.
  • et des ateliers participatifs, où chacun peut créer sa propre version du personnage de l’eau, et ainsi ramener son gardien chez soi.

Je souhaitais travailler simultanément la narration, l’animation, la musique et l’image grâce à l’application pour créer un univers enveloppant, mystérieux et poétique. J’ai collaboré avec Julien Hognon et Étienne de Volumique, ainsi qu’Apollo Noir et Thomas P., afin que chacun apporte sa sensibilité. Les filtres, idée proposée par Julien de Volumique, ont particulièrement orienté le projet vers cette notion de regard de l’eau, de perceptions multiples et changeantes.

Sur le plan visuel, j’ai voulu évoquer ces routes d’eaux visibles et invisibles. À travers une technique au feutre, je cherche à montrer que l’eau n’est pas seulement spatiale : elle relie aussi les gens, elle crée un point commun. Les tracés graphiques sont inspirés de voies d’eau, et les différents personnages que l’on rencontre,  bien que multiples, sont en réalité un seul et même être, car ils partagent le même œil.

Cet œil unique voyage entre les êtres vivants et se retrouve dans tous les points d’eau qui nous entourent. Il incarne la continuité, la circulation, les liens invisibles qui existent entre nous.

 

  • Quels sont les artistes (tous domaines confondus) ou plus généralement, les formes artistiques qui nourrissent votre démarche de création, et éventuellement, les références auxquelles vous faites allusion dans cette installation ?

Je m’intéresse beaucoup à la mode et au design: Issey Miyake, Bruno Munari, Enzo Mari sont des créateurs qui travaillent des dispositifs et des mécaniques.

Dans cette installation, plus spécifiquement, il s’agit d’apprendre davantage sur le monde de l’eau, sa façon de percevoir les autres, ses relations tout en découvrant parallèlement quelque chose sur soi-même. Deux de ses amis interviennent aussi : l’Œil du Tonnerre et l’Œil du Ciel, des personnages secondaires qui enrichissent son univers.

J’ai également voulu partager différentes réflexions et concepts liés à l’eau, que je trouve particulièrement intéressants et révélateurs d’une véritable philosophie de l’eau, notamment :

  • Wu Wei(la non-action, Taoïsme)
  • Mizu no Kokoro(水の心), “l’esprit de l’eau” (Japon)
  • Panta Rhei(Grec : “tout s’écoule”)
  • L’Eau et les Rêves de Gaston Bachelard

Et j’y ai intégré plusieurs expressions provenant du monde entier, porteuses d’une sagesse universelle autour de l’eau :

« L’eau qui coule ne moisit pas. » (Grec)

« L’eau est fine mais lourde. » (Inde)

« L’eau est le plus ancien des remèdes. » (Finnois)

« Ne te baigne pas dans une eau que tu ne connais pas. » (Sénégal)

« L’eau coule et trouve son chemin. » (Chine)

« Quand l’eau arrive, le canal se forme. » (Chine)

« Les eaux calmes sont profondes. » (Allemagne)

« Comme l’eau sur le dos d’un canard. » (France)

« L’Esprit comme l’eau. » (Japon)

« Comme un poisson dans l’eau. » (France)

Tout au long de l’expérience, le personnage de l’Eau nous parle. Si l’on prend le temps de s’ouvrir à lui, on accède à ses conseils, susceptibles de nous accompagner au quotidien.

Plus globalement, c’est une manière d’évoquer la multiplicité des regards : montrer que notre vision peut s’enrichir lorsque l’on se met à la place de l’autre et que l’on accepte que chacun perçoit le monde différemment. Cela vaut aussi bien pour un animal dont la vision diffère de la nôtre, pour une image personnifiée — comme ici l’eau — que pour des personnes venant d’ailleurs, d’une autre culture, d’un autre milieu social ou vivant avec un handicap.

C’est une invitation à accueillir les différences et les points de vue. Voilà le message que je souhaite transmettre.

 

  • Quelles sont les difficultés, les contraintes, les défis à relever… rencontrés lors de son élaboration ?

Le défi majeur est d’utiliser la réalité augmentée comme support de narration et non simple gadget, pour cela il faut travailler l’entremêlement de l’usage, de l’illustration et de l’animation.

 

  • Pouvez-vous nous indiquer une ou plusieurs adresses internet où l’on peut voir votre travail ?

Instagram: @julie_stephen_chheng

 

  • Quelques mots-clés qui s’accommoderaient bien à votre installation ?

Interactif, dispositif, narratif, narration combinatoire, illustration

 

  • Quelques mots sur votre parcours artistique ? A quelle période de votre vie vous êtes-vous interessé-e à l’art numérique ? Arrivez-vous à vivre de votre activité créatrice ?

Je suis diplômée des Arts Décoratifs de Paris dans la section Image Imprimée, où j’ai appris à créer des livres de la narration, l’illustration, le graphisme jusqu’à l’impression et la reliure. Très vite, je me suis intéressée à l’Oulipo et aux livres à systèmes pour explorer différentes mécaniques de fabrication d’histoires. Entourée de personnes travaillant dans le cinéma, j’ai entrepris de mêler les techniques de fabrication d’un livre aux outils numériques afin de créer des univers où le choix et le mouvement du spectateur jouent un rôle et enrichissent l’histoire.

Je vis de mes projets personnels depuis 6-7 ans.

 

videoformes.com >